Le feuilleton de Glasgow, Day Seven : Du Flat pas plat, deux relais d’argent, et la révélation Fortin.

On s’est partagé entre le Green Park de Glasgow pour les demies du Flat, où les Français ont bien dansé, et le relais mixte du Trial, où ils sont restés impeccablement perchés. À Peebles notre relais mixte a assuré l’argent, et au vélodrome Valentine Fortin a commencé à tutoyer les patronnes.

Deux trois choses que je sais du Flat

On s’est décidé. Bien travailler, bien comprendre les choses, c’est parfois s’accorder le temps de s’en imprégner : la compréhension n’est pas seulement affaire de volonté. J’en veux pour preuve cette vérité admise selon laquelle « la nuit porte conseil. » Pour comprendre, il faut -aussi- s’abandonner. C’est d’ailleurs une vertu du cyclisme : ne dit-on pas que rouler « lave la tête », « remet les idées en place » ?

À l’occasion des demi-finales de Freestyle Flat, on a donc pris le temps de flâner (oui, absolument) au Green Park, d’admirer, d’observer – et, déjà, de se faire expliquer deux ou trois choses. Comme pour le Park, les Flat-riders revendiquent fièrement (comme il ont raison) la dimension créative de leur discipline, tout en regrettant parfois la subjectivité (c’est-à-dire la « discutabilité ») des jugements. Eh, la réduction de l’esthétique à la mesure est impossible ! En Flat, la nécessité d’être créatif est évidente : il existe des dizaines de figures répertoriées, mais les riders les enchainent un peu comme les mots dont on fait les phrases. Si bien qu’en dresser la liste n’aurait guère de sens : fondamentalement le mouvement échappe au langage, et l’inédit est inépuisable. C’est le rider français Anatole Rahain, lui-même éliminé la veille (et largement sous-noté de l’avis général) qui m’explique ça, tandis qu’un concurrent japonais fait tourner son bike plus vite qu’un batteur à omelette. Chez les filles, la première place d’Aude Cassagne n’est pas une surprise, mais la joie est entière, même si c’est demain, pour la finale, qu’il faudra assurer. Puis Matthias Dandois se pointe. Sa silhouette d’échalas musclé. Plus à l’aise, tu meurs. D’une main, il fait signe au DJ de monter la musique et de l’autre il fait mine de ne pas entendre les applaudissements du public. Je comprends mieux pourquoi Anatole me parlait de « la scène Flat ! » Le nonuple Champion du Monde réussit un excellent passage, un truc entre la valse, le tango et le breakdance qui le place en seconde position. Au calme. En coulisse, le roublard aurait confié garder dans sa manche « deux trois tricks pour demain. » Ok, Matthias, on revient demain.

À Peebles, 2e du relais mixte VTT pour 9’’ !

Yvan Clolus, le head coach du VTT français avertissait d’emblée : « Il y a un peu de tension avant le lancement de ces championnats. Quant à nous, la France, on est attaché à ce relais mixte, parce qu’il marque le niveau global de la Nation, et qu’il permet aussi de juger des progrès de chacun. Le relais nous donne beaucoup d’infos sur la suite de la semaine. »

Les rangs français constitués de Loana Lecomte, Line Burquier, Anaïs Moulin, et de Jordan Sarrou, Adrien Boichis, Julien Hemon, ont fait plier tous leurs adversaires sauf un : la Suisse, dont il faut reconnaitre et saluer les forces. « Il fallait battre l’Italie le Danemark, cette médaille on la prend. Bien sûr on aurait voulu plus, d’autant qu’on n’échoue qu’à 9 secondes. » Une poignée de secondes derrière la Suisse, ça nous rappelle quelque chose ?

Les courses VTTAE aussi, ont porté leur lot de médailles. Le bronze pour une Justine Tonso d’autant plus heureuse, qu’elle a dû s’accrocher dur pour conserver sa troisième place. Chez les hommes, l’équipe de France truste le classement mais manque le titre, revenu au Suisse Joris Ryf. En effet, les Français se classent 2, 3,4,5 et 8e. Hugo Pigeon est ravi de sa médaille d’argent, mais Jérôme Gilloux, bien sûr, est déçu de sa médaille de bronze, lui qui était champion en titre.

Omni-Valentine : fortiche

Retour dans la fournaise chérie du vélodrome. On ne sait trop à quoi s’attendre au départ de la course scratch. Valentine Fortin est accrochée à la balustrade, les yeux perdus derrière la visière. Sous son casque orange, son gabarit étonne, au milieu de silhouettes plus épaisses. Pourtant la Française marque 22 points et se classe 11e, fastoche, juste un peu débordée par les mastards dans le sprint final. Et vlan, Valentine.

Puis sur la Tempo Race (ainsi nommée parce qu’un sprint à chaque tour de piste, ça vous régule une allure mieux qu’un métronome électronique) elle se montre plus qu’à l’aise, elle prend un tour, carrément – rappelant aux concurrentes que deux jours après sa médaille d’argent à l’élimination, il faut désormais compter avec elle. Une heure plus tard, pendant l’élimination justement, elle donne des sueurs froides à son coach, en ne laissant souvent que trois, voire deux filles derrière elle sur la ligne. Puis, à mesure que le peloton s’amenuise, elle assure de plus en plus. Contrairement à avant-hier, Valente (tiens, au passage : Valente/Valentine : m’est avis que le suffixe  « ine » n’a pas valeur de diminutif – pas plus que fortin ne désigne un « petit » fort : halte aux raccourcis !) lui résiste, mais elle sort 3e, à 2 points de l’Américaine, et 4 d’une Kopecky décidément super costaude…

La fatigue aidant, ou la tension nerveuse, la course aux points fut un peu plus difficile. La densité de niveau qui règne à Glasgow ne permet pas la moindre erreur. Il faut ne pas faire l’effort de trop. Or, alors qu’un petit wagon doublait, comprenant des pointures telles Katie Archibald (déchaînée, qui mettait le vélodrome en transe) l’inévitable Valente ou Dideriksen, Valentine aurait dû coller, comme bernicle à la roche, à la roue d’une Kopecky momentanément piégée comme elle. Car la Belge, bel et bien, s’est accordée deux tours de « roue libre », avant de lancer une contre-attaque fulgurante que la Française n’a pas pu suivre. Omni-Fortin sort donc 5e de cette course aux points, aussi bien que de l’Omnium. Pour une première sortie à ce niveau, Valentine n’a pas failli, loin s’en faut. On regrettera qu’un petit moment de déconcentration lui ait coûté le casse qui était à sa portée ! (smiley désolé)

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