Le feuilleton de Glasgow, Day Eight : Cassagne en or, Dandois cool en bronze, deux K en argent, 15e arc-en-ciel pour PFP !

Il a fait beau et chaud (si !) Au Flat, le public a tombé la veste pour Aude Cassagne et Matthias Dandois (et des Japonais super forts, faut bien dire.) À Sterling, sous les coquilles effilées de leurs casques, Juliette Labous et Cédrine Kerbaol ont tracé comme des flèches. Et à Peebles, après que Victor Koretzky eut échoué d’un cheveu sur la ligne (allez trouver un cheveu sur une ligne, vous !), la reine PFP a de nouveau imprimé son sceau sur la short.

Cassagne et Dandois : la patronne et l’ambassadeur

La cellule familiale est le fondement de nos sociétés, et gage d’exemplarité : ainsi tout ce qui se revendique vertueux, de près ou de loin se réclame de la « famille » (la famille du sport, la famille du cinéma, celle de l’entreprise, etc.) Bien sûr il faut être naïf pour imaginer qu’affection et loyauté sans ombre régissent tous ces milieux. Et pourtant, quand on a la chance de s’approcher d’un podium de Flat, et de s’y mélanger aux riders eux-mêmes, c’est bien le mot de « famille » qui vient à l’esprit. Certes, la « Flat Family » est plus funky et plus tatouée (quoique…) que la cellule bourgeoise standard (pour tout vous dire, on pense à la FFF, le groupe : fédération française de funk) mais le respect et l’affection mutuels n’y règne pas moins. Hier soir, tous les riders de la compétition, toutes nations confondues, ont dîné ensemble dans un restau indien de Glasgow. C’est pas beau, ça ?

Et, le jour du contest, assister à la prestation d’un athlète encouragé par tous les autres concurrents réunis au pied du podium, lesquels n’auront de cesse de lui donner l’accolade sitôt qu’il en sera descendu, ce n’est tout de même pas le spectacle le plus courant. Un peu plus tard, en attendant de monter chercher sa médaille et de « chanter la Marseille avec Aude », Matthias Dandois, ambassadeur hors-pair de sa discipline, tempérera (à peine) mon enthousiasme : « On n’est tout de même pas heureux de voir les autres gagner, mais il y a un vrai respect : on applaudit au progrès des autres ! », dit le médaillé de bronze du jour, qui devra attendre, donc, fin 2024 pour essayer de décrocher, en une ultime tentative, un dixième titre à Abu Dhabi. Non sans ajouter « Mais je suis heureux de voir des jeunes de 18 ans sortir des tricks dont je ne serai jamais capable : si ce n’était pas le cas, ça voudrait dire que mon sport n’évolue pas et que j’ai été un mauvais ambassadeur. » Une fois de plus, Dandois a donc fait le show, et montré combien peu de prise ont les années sur lui. Tirons donc, ne passant, un grand coup de chapeau à Yu Shoji, assez prodigieux, et Kio Hayakawa, 1er et 2e de la compétition.

Précédemment, chez les filles, Aude Cassagne a tenu la baraque pour la deuxième année consécutive, cumulant 87,66 points, contre 84,50 pour la Brésilienne Santiago de Oliveira et 82,66 pour la Japonaise Nakagawa. Il a suffi d’un trait à la désormais double championne du monde pour confirmer sa réputation de personnage à part : descendant du podium, en plein concert de congratulations, n’a-t-elle pas lâché dans un soupir de soulagement : « Bon, deux fois ça suffit : maintenant j’arrête ! » Interrogée par nos soins, elle ne confirme pas formellement, mais précise : « Je ne suis pas très compète dans l’âme. En compétition, on ne peut présenter que des tricks parfaitement maîtrisés. Moi je préfère rouler à la maison et me focaliser 30mn sur un truc difficile, le genre que je n’arriverai jamais à sortir ici ! »

La championne du monde (médecin anatomo-pathologiste : pas vraiment courant non plus) appelle de ses vœux une professionnalisation du Flat, « car, rappelle-t-elle, on a tous un boulot pour manger. Je me suis entrainée un peu plus depuis 3 ou 4 semaines, parce que j’avais pris des vacances pour me préparer. Les plus jeunes le méritent : le potentiel est là, dans les rangs français, on a quand même 4 demi-finalistes sur 5 engagés. Il est étonnant d’être aux championnats du mode et de concourir avec des riders venus seuls et à leurs frais. » Les parents pauvres n’ont pas vocation à le rester.

Contre-la-montre : Labous et Kerbaol pas si loin

À Sterling où se tenaient ce jour les épreuves contre-la-montre des dames, Marlen Reusser diminuée a laissé le champ libre à la fusée Dygert, qui n’a pas manqué l’occasion, couvrant les 36,2km en 46’59. Dans une spécialité insuffisamment « culturelle » en France, où l’on sait devoir mettre les bouchées double en matière de formation, les Françaises n’ont pas démérité, et c’est bon signe. Juliette Labous se classe 5e, à 1’22’’ du titre, mais à 10’’ du podium. En se classant 9e (à 2’35 de la gagnante) Cédrine Kerbaol s’assure une médaille d’argent dans la catégorie U23 : déception pour elle. On voudrait la consoler : c’est une sacrée perf !

Pas de victoire – mais presque – pour Victor

Today, c’était short race à Peebles. Victor Koretzky (je sais pas, moi j’ai toujours trouvé que ça sonne comme un nom de roi, Koretzky) est passé près de la cible, il s’en est fallu de peu qu’il vienne sauter Gaze (le vainqueur) sur la ligne. Victor a manqué la victoire d’un rien (d’un i), mais il reste une course, la grande…

PFP la collectionneuse

Mais elle, là revoilà bel et bien : PFP is back, qui rempile et conserve son titre en short-race. C’est rien moins que son 15e titre mondial, à Pauline. Mais elle souligne que, pour ce qui est d’être championne du monde, la valeur symbolique l’emporte sur la matérialité des objets (on veut bien la croire, nous qui ne fûmes jamais champion de rien), et que les maillots eux-mêmes, elle ne sait pas trop où elle les range, voire qu’elle les donne. Pauline aime les symboles, pas les fétiches : c’est un enseignement intéressant.

S’il fallait une démonstration de son caractère bosseur, on l’aurait, flagrante : alors que les années émoussent plutôt l’explosivité des athlètes, Pauline affûte encore la sienne ! Les derniers temps, elle a pas mal travaillé « les efforts de 5’’ » à l’entrainement. C’est très court, cinq secondes, mais c’est exactement le genre d’effort qu’il lui a fallu produire dans la partie la plus raide de la bosse, pour que se rassoient les cinq dernières concurrentes qui s’accrochaient encore dans sa roue à trois tours de l’arrivée. Cela étant, pour être explosif, il faut être d’abord parfaitement relâché, et ne pas se disperser – car on n’explose bien qu’une fois. « La short race, c’est tactique. Les coaches mettent la pression, mais moi je savais qu’il ne fallait pas se tirer une balle dans le pied en attaquant trop tôt. J’ai attendu, j’ai un peu joué avec le feu, peut-être. Mais je pensais aussi à en garder sous la pédale pour la course de samedi, qui reste mon objectif principal. J’ai fait un bon déblocage, disons. Mais bon, c’st un maillot arc-en-ciel, déjà, ça a toujours une saveur particulière. Ca se savoure. » Là encore, on ne peut que croire, sans savoir.

Nos disciplines